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Comme le soulignait fort justement Leblois il y a presqu’un siècle : « Les auteurs se sont contentés de façonner l’eczéma du chien au gabarit supposé de celui de son maître […] Tout ce que les livres dits classiques rapportent à son endroit ne sont que des applications, des transpositions gratuites de notions médicales humaines». En effet, historiquement, la DAC a été décrite par anthropomorphisme et la plupart des études récentes ont pour but de montrer que DAC et dermatite atopique humaine (DAH) sont deux syndromes identiques. Cette volonté est guidée par le fait que le chien est le seul modèle animal spontané de cette maladie.

Une même maladie ?

Les résultats de la plupart des études tendent à montrer que la pathogénie et la symptomatologie sont très proches et parfois identiques chez le chien et chez l’homme avec des signes cliniques apparaissant chez le jeune et une atteinte préférentielle de la face des extrémités et des zones de flexion (tableau I).

Tableau I: Points communs et différences entre dermatite atopique canine et humaine (Prélaud, P. (2017). Dermatite atopique canine. Paris, Masson-Elsevier.)

Il existe toutefois quelques différences anecdotiques ou fondamentales, peu surprenantes tant chien et homme ont une structure de peau et de pelage différents et surtout des habitudes de vie et d’hygiène encore plus différents.

La différence la plus spectaculaire est l’absence d’évolution de la symptomatologie et des sensibilisations avec l’âge chez le chien. En effet, chez l’homme, la dermatite atopique peut évoluer vers la régression, suivie ou non de symptômes respiratoires et les sensibilisations alimentaires évoluent radicalement et sont surtout dues à des réactions croisées avec des pollens chez l’adulte. Le chien, lui, présente une DAC qui évolue peu tout au long de sa vie, tout comme ses sensibilisations à des aéroallergènes ou des trophallergènes. Le mode de vie des chien au ras du sol explique le caractère non saisonnier des allergies aux Graminées et son alimentation la prépondérance des allergie aux protéines de viandes (exceptionnelles chez l’homme). Les allergènes majeurs des pollens sont mal connus chez le chien, mais sont proches de ceux de l’homme (ambroisie, cèdre du Japon). Par contre, les allergènes majeurs des acariens chez le chien sont sensiblement différents (fort PM) de ceux de l’homme (faible PM).

Le chien , un peu à l’image de la DAH en milieu tropical présente de nombreuses ectoparasitoses qui peuvent soit mimer une DAC, soit la compliquer ou être des causes de poussées. De même, le parasitisme digestif est bien plus important chez le chien que chez l’homme, ce qui pourrait expliquer une autre différence importante entre chien et homme : une concentration 100 fois plus importante des IgE totales plasmatiques.

Les complications infectieuses existent et sont fréquentes dans les deux espèces, mais chez le chien celles à Malassezia sont très fréquentes et aucune herpès virose ne vient compliquer les formes graves.

Les défauts de barrière sont bien étayés dans les deux espèces, mais les mutations FLG et les ichtyoses ne sont pas des facteurs pronostiques chez le chien.

Curiosité biologique, les médiateurs du prurit ne sont pas les mêmes chez l’homme et le chien, si l’on fait abstraction de l’IL-31. L’histamine injectée à un chien ne provoque aucun prurit et le poil à gratter (cowhage) est presque aussi peu actif. Alors que l’humain peut développer aisément des dermatites de contact à de nombreux produits, ces dermatites sont très difficiles à induire chez le chien. Ceci, tout comme des modes de vie différents (peu de bijou, de cosmétiques par exemple), explique la quasi absence des dermatites de contact chez le chien atopique.

DAC et DAH sont donc des modalités réactionnelles d’aspects clinique et pathogénique proches, mais avec des causes différentes, liées à des interactions environnementales (au sens large) différentes.

Des habitudes thérapeutiques très différentes

Comme nous l’avions vu lors de la réunion de l’ISAD consacrée au traitement comparé de l’homme et du chien, les approches sont assez différentes tant pour des raisons pratiques que réglementaires

Le pelage limite grandement chez le chien le recours aux soins topiques et notamment aux dermocorticoïdes et aux soins émollients, alors qu’ils sont très largement utilisés en première intention chez l’homme. Cela s’accompagne d’une offre bien plus variée que la nôtre bien entendu.

A contrario, la culture de la piqûre chez le vétérinaire a encré inconsciemment les traitements systémiques tant en phase aiguë que chronique comme la première solution chez le chien. De même le développement des aliments thérapeutiques haut de gamme a donné une place prépondérante à l’alimentation que l’on ne retrouve pas chez l’homme.

Enfin, sur le pan réglementaire, tous les vétérinaires sont autorisés à prescrire les traitements ayant une AMM chez le chien. Chez l’homme, certains traitements onéreux, comme les biothérapies, sont réservés aux patients qui ont suivi tout un parcours du combattant à travers toutes les options thérapeutiques autres. Et d’une façon générale les dermatologues sont assez frileux face aux traitements systémiques quand des habitudes de soins topiques ont été prises ; C’est vrai pour la DA, mais cela a été très longtemps le cas pour la gale.

Finalement les chiens ont relativement de la chance. Ils peuvent bénéficier de toutes les approches thérapeutiques et ce assez tôt dans l’évolution de leur maladie.

 

Illsutration : Manu I ED-H I, ©Poulot éditions

Tag(s) : #One health, #Une santé, #chien, #homme, #dermatite atopique
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