Le monde de l’allergologie est parfois d’un onirisme magnifique. Tous les fantasmes s’y développent, des plus scientifiques aux plus loufoques, voire aux plus malhonnêtes.
Nous avions relevé un de ces exemples en commentant la commercialisation de tests allergologiques in vitro en décembre 2014 totalement farfelus par une firme allemande. Voici deux nouveaux exemples tout aussi poignants par leur naïveté et révoltants, tant les instigateurs de ces examens nous prennent pour des c… Rappelons que faute d’une législation, tous les examens de laboratoire peuvent être commercialisés en médecine canine, même s’ils n’ont strictement aucune valeur diagnostique. Ces « laboratoires » ne sont soumis à aucune règle de contrôle de qualité ou de qualification des intervenants (pas besoin d’être biologiste, aucun diplôme exigé). C’est intellectuellement malhonnête, mais légal !
Voici les deux pépites
1. Envoyez-moi des poils je vous dirai s’il est allergique
Une firme américaine propose depuis de nombreuses années un « test » allergologique basé sur des prélèvements de salive ou de poils. La ficelle est grosse : « pas besoin de passer par votre vétérinaire pour soigner votre animal, quelques poils dans une enveloppe et le tour est joué ». Le succès était tel aux Etats-Unis, qu’il a fallu qu’une équipe de recherche se penche sur cet examen pour savoir s’il avait une réelle valeur diagnostique. Sans surprise l’examen n’a strictement aucune valeur diagnostique 1.
2. Donnez moi une goutte de sang je vous dirai si c’est une dermatite atopique
Un laboratoire propose aujourd’hui en France à grands renforts de publicité des tests rapides de diagnostic de la dermatite atopique. Ils sont (soi-disant) basés sur la mesure des IgE totales plasmatiques. L’examen est magnifiquement simple, comme un G-test, une goutte et une barre colorée apparaît en 10 minutes si l’animal a trop d’IgE totales. Le prospectus publicitaire (sans aucune référence) annonce même une sensibilité et une spécificité de plus de 90%. Peut-être que sur le plan analytique la technique est bonne - c’est-à-dire qu’elle permet de mesurer des IgE (d’où les bonnes spécificité et sensibilité) - mais hélas, sur le plan diagnostique, cet examen est un non sens total, un foutage de gueule de premier ordre, comme on imaginait ne plus en voir. En effet, chez le chien, contrairement à l’homme, les IgE totales ne sont pas un marqueur de l’atopie et encore moins de la dermatite atopique. Tant dans des études interaciales qu’intraraciales, il n’existe pas de différence de concentration plasmatiques en IgE totales entre chiens atopiques et non atopiques. Mieux, dans une étude, des chiens de race Greyhound non atopiques ont des concentrations plasmatiques plus élevées que les chiens atopiques 2!
Les diseurs de bonne aventure sont doués et débordent d’imagination, mais par pitié arrêtez de nous prendre pour des gogos. Ce ne sont pas les premiers tests parfaitement inutiles commercialisés, mais ces deux derniers dépassent le mur du çon. Peut-être que les instances professionnelles pourraient se pencher sur ces dérives…
1. Coyner K, Schick A. Inaccuracy of a hair and saliva test for allergies in dogs. 2016; 2016.
2. Pucheu-Haston CM, Bizikova P, Eisenschenk MN, Santoro D, Nuttall T, Marsella R. Review: The role of antibodies, autoantigens and food allergens in canine atopic dermatitis. Vet Dermatol 2015; 26: 115-e30.